Q&R qui lève le doute relatif à la question de la souveraineté de Takeshima
- Q1En vertu du droit international, la proximité d’un territoire avec une nation donnée permet-elle à cette dernière d’affirmer sa souveraineté sur ce même territoire ?
- Q2Takeshima apparaît-elle sur des cartes et dans des documents coréens anciens ?
- Q3Qui était An Yong-bok ?
- Q4Existe-t-il des preuves prouvant une souveraineté coréenne sur Takeshima avant son rattachement par le gouvernement japonais en 1905?
- Q5Takeshima est-elle comprise dans les « territoires [que le Japon] a acquis par violence et cupidité » de la Déclaration du Caire ?
- Q6Les îles Takeshima ont-elles été exclues du territoire japonais par le Commandement suprême des forces alliées dans le Pacifique (SCAP) après la Seconde Guerre mondiale ?
Q1En vertu du droit international, la proximité d’un territoire avec une nation donnée permet-elle à cette dernière d’affirmer sa souveraineté sur ce même territoire ?
La Corée du Sud fait valoir que, du fait de leur proximité géographique, « les îles Takeshima font géographiquement partie de l’île d’Utsuryo (Ulleungdo en coréen) ».Cependant, selon le droit international, la proximité géographique ne suffit pas à elle seule à prouver la souveraineté territoriale. Cette conception se retrouve également dans les avis rendus par diverses cours de justice internationales.
Ainsi, dans le différend concernant la souveraineté sur l’île de Palmas qui opposa dans les années 1920 les États-Unis et les Pays-Bas, la Cour permanente d’arbitrage (CPA) statua que « le titre de la contiguïté, envisagé comme base de la souveraineté territoriale, n’a aucun fondement en droit international ». Plus récemment, dans le différend territorial et maritime dans la mer des Caraïbes de 2007 entre le Honduras et le Nicaragua, la Cour internationale de justice (CIJ) a décidé que la contiguïté géographique ne conférait aucun fondement légal au Nicaragua pour justifier les revendications territoriales des Parties sur les formations maritimes concernées. Par ailleurs, dans le différend territorial qui opposa en 2002 l’Indonésie et la Malaisie au sujet de Pulau Ligitan et Pulau Sipadan, la CIJ rejeta les arguments de l’Indonésie selon lesquelles sa souverainté s’exerçait sur ces deux îles situées à 40 miles marins d’une autre île faisant partie intégrante de son territoire national.
Q2Takeshima apparaît-elle sur des cartes et dans des documents coréens anciens ?
Non. La Corée du Sud affirme que « l'île d'Usan », qui figure sur des cartes et dans des documents coréens anciens, correspond aux îles appelées aujourd’hui Takeshima. Mais cette revendication ne repose sur aucun fondement.
Les documents anciens sur lesquels la Corée du Sud s’appuie pour étayer ses arguments
Sur la base des documents coréens anciens, la Corée du Sud fait valoir qu’elle connait depuis des siècles l’existence des îles «d’Utsuryo (Ulleugndo en coréen) » et «d’Usan (Mureung) », cette dernière correspondant précisément aux îles connues aujourd’hui sous le nom de Takeshima. Cependant, on n’a trouvé jusqu’à présent aucun texte coréen ancien prouvant les affirmations coréennes que l’île d’Usan et Takeshima sont bien une seule et même localité.
Par exemple, la Corée du Sud soutient que le Sejong Sillok Jiriji (Appendice géographique à la Chronique du roi Sejong, 1454) et le Sinjeung dongguk yeoji seungnam (Édition révisée de la nomenclature augmentée de la géographie de la Corée, 1531) mentionnent que les deux îles d’Usan et d’Utsuryo sont situées au large des côtes orientales du district d’Uljin, et que l’île d’Usan est Takeshima. Toutefois, le Sejong Sillok Jiriji indique également que « cette île était connue sous le nom de province d’Usan durant la période Silla [VIIe – Xe s.] . Elle portait aussi le nom d’île d’Utsuryo et sa superficie faisait 100 li [env. 40 km2] » (新羅時称于山国 一云欝陵島 地方百里). Le Sinjeung dongguk yeoji seungnam déclare que « d’aucuns affirment qu’Usan et Utsuryo sont à l’origine une seule et même île. Sa superficie est de 100 li » (一説于山欝陵本一島 地方百里). Ces documents font uniquement référence à l’île d’Utsuryo et ne contiennent aucun élément concret relatif à « l’île d’Usan ». D’autres archives historiques coréennes montrent clairement que l’île d’Usan ne correspond pas à Takeshima. Ainsi, le 33e volume du Taejong sillok (Chronique du temps du roi Taejong) mentionne à la date du mois de février de la 17e année de son règne (1417) que: « le commissaire chargé de la pacification des frontières (anmusa) Kim In-u est rentré de l’île d’Usan en rapportant avec lui des produits locaux tels que des bambous de belle taille […]. Il a également ramené trois insulaires. La population locale compte une quinzaine de familles, soit 86 hommes et femmes au total.» (按撫使金麟雨還自于山島 獻土産大竹水牛皮生苧綿子撿撲木等物 且率居人三名以来 其島戸凡十五口男女并八十六). Toutefois, Takeshima n’abrite aucune bambouseraie et n’est pas en mesure d’accueillir 86 habitants.
La Corée du Sud fait valoir que le Dongguk Munheon Bigo (Compilation référentielle des documents sur la Corée, 1770) ainsi que d’autres documents indiquent qu’« Utsuryo et Usan sont tous deux des territoires relevant du district d’Usan, qui est appelé Matsushima au Japon ». Mais les descriptions contenues dans les textes publiés à partir du XVIIIe siècle s’appuient sur les déclarations peu crédibles d’un homme, An Yong-bok, entré illégalement au Japon en 1696 (cf. Q&A3). Par ailleurs, même si les rédacteurs de ces documents du 18e et 19e siècles mentionnent qu’« Usan est appelé Matsushima au Japon », cela ne signifie nullement que l’« Usan » figurant dans le Sejong Sillok Jiriji et le Sinjeung dongguk yeoji seungnam soit bien Takeshima.
Les cartes anciennes sur lesquelles la Corée du Sud s’appuie pour étayer ses arguments*
Certains en Corée du Sud insistent sur le fait que l’île d’Usan indiquée sur les cartes coréennes publiées à partir du XVIe siècle correspond à Takeshima. Mais ce n’est pas le cas.
* En vertu des principes du droit international, les cartes ne peuvent servir à prouver une souveraineté territoriale si elles ne sont pas associées à un traité. Et même si elles sont jointes comme annexes à un traité, elles n’ont que la valeur corroborante que leur accorde le traité, dont le texte est le seul élément attestant la volonté des parties concernées.
Par exemple, la « Carte des huit provinces de Corée » jointe au Sinjeung dongguk yeoji seungnam (Édition révisée de la nomenclature augmentée de l'étude de la géographie de la Corée) indique les deux îles d’Utsuryo et d’Usan. Si « l’île d’Usan » était bien Takeshima, comme l’affirme la Corée du Sud, elle devrait apparaître à l’est de l’île d’Utsuryo et être d’une taille bien plus petite que celle-ci. Or, « l’île d’Usan » qui apparait sur cette carte est localisée entre la péninsule coréenne et l’île d’Utsuryo, et est d’une taille sensiblement identique à cette dernière. Cela signifie que l’ « Usan » de la « Carte des huit provinces de Corée » est soit l’île d’Utsuryo présentée sous la forme d’un ensemble de deux îles, soit une île imaginaire. Il est toutefois impossible qu’elle puisse être Takeshima, qui sont situées bien plus à l’est de l’île d’Utsuryo.

▲« Carte des huit provinces de Corée », in Sinjeung Dongguk Yeoji Seugnam (Édition révisée de la nomenclature augmentée de l'étude de la géographie de la Corée) (copie).
Sur les cartes de la Corée publiée à partir du XVIIIe siècle, l’île d’Usan est représentée à l’est de l’île d’Utsuryo. Toutefois, cette dernière ne correspond pas non plus aux actuelles Takeshima.
Sur la « Carte détaillée de l’île d’Utsuryo » réalisée à l’occassion de la mission d’inspection effectuée en 1711 sur l’île d’Utsuryo par Bak Seok-chang, « l’île d’Usan » apparaît à l’est de l’île d’Utsuryo, mais avec la mention : « Ile dite d’Usan. Etendues de bambous haejang ». Le bambou haejang (ou bambou du Japon ; Pleioblastus simoni) est une plante herbacée vivace qui ne peut en aucun cas pousser sur Takeshima, qui est une île rocheuse. Il pousse par contre sur l’île de Chikusho (Jukdo)*, qui est située à environ 2 km à l’est de l’île d’Utsuryo. Ceci laisse penser que « l’île d’Usan » de la « Carte détaillée de l’île d’Utsuryo » pourrait en fait être l’île de Chikusho (Jukdo).
*Chikusho (Jukdo) : petite île située à 2 km à l’est de l’île d’Utsuryo.

▲Plan d’arpentage de l’île d’Utsuryo du service hydrographique de la Marine
L’éminent cartographe coréen Kim Jeong-ho réalisa en 1834 le Cheonggudo, qui comprend une carte de l’île d’Utsuryo laissant apparaître sur son côté orientale une île toute en longueur du nom d’« Usan ».
Cette carte comporte une série de repères sur sa bordure extérieure (1 repère = 10 li coréens, soit environ 4 km) permettant d’estimer les distances. Si on considère que les îles d’Utsuryo et d’Usan représentées sur cette carte ne sont séparées l’une de l’autre que de 2 ~3 km, ainsi que la morphologie de l’île « d’Usan », il est évident qu’il s’agit de l’île de Chikusho (Jukdo), qui est située à 2 km à l’est de l’île d’Utsuryo (les îles Takeshima sont pour leur part situées à 90 km de l’île d’Utsuryo).
Autrement dit, l’« Usan » figurant sur les cartes de la Corée publiées à partir du XVIIIe siècle est vraisemblablement l’île de Chikusho (Jukdo).

▲« Carte de l’île d’Utsuryo », in le Cheonggudo (1834) (Bibliothèque centrale de Tenri, Université de Tenri). Reproduction interdite.
Les cartes sur lesquelles l’île de Chikusho (Jukdo) est appelée Usan et est placée à 2 km à l’est de l’île d’Utsuryo continuèrent d’être produites durant l’époque moderne. Le Daehanjeondo (Carte complète de la Corée) imprimée en 1899 par le Bureau des publications du ministère de l’Éducation de l’Empire coréen est une carte moderne comportant les latitudes et les longitudes, mais laissant aussi apparaître « Usan » juste à coté de l’île d’Utsuryo. Encore une fois, cette « Usan » est l’île de Chikusho (Jukdo) et non Takeshima.

▲Le Daehanjeondo (Carte complète de Corée) (Crédits photo : Toyo Bunko [The Oriental Library])
Q3Qui était An Yong-bok ?
An Yong-bok était un citoyen coréen qui a été emmené au Japon par des gens de la famille Ôya après avoir été surpris en train de pêcher sur l’île d’Utsuryo (alors appelée Takeshima au Japon) en 1693. Il retourna au Japon de son plein gré en 1696, pour régler un différend judiciaire avec le fief de Tottori. Par la suite, An Yong-bok fut toutefois arrêté et interrogé par les autorités coréennes pour avoir quitté le pays sans autorisation. Au cours de son interrogatoire, il déclara qu’il avait rencontré des Japonais sur l’île d’Utsuryo, qu’il accusa d’avoir pénêtré illégalement sur le territoire coréen. Ces Japonais lui auraient déclaré habiter sur l’île de Matsushima, ce à quoi il aurait répondu que cette île était « l’île de Jasan (Usan) » et qu’elle appartenait également à la Corée. C’est ainsi que les documents coréens publiés par la suite associèrent l’île d’Usan à Takeshima.
La Corée du Sud cite la déposition d’An Yong-bok comme preuve de sa souveraineté territoriale sur Takeshima .
Elles figurent dans le Sukjong Sillok (Chronique du roi Sukjong), à la date du mois de septembre de la 22e année du règne du roi Sukjong (1696). Toutefois, ce même document mentionne (pour le mois de février 1697) que les autorités coréennes de l’époque n’étaient pas concernées par les actions d’An Yong-bok, ce qui confirme bien qu’il n’agissait pas au nom du royaume de Corée (cf. supplément 1). En outre, les déclarations d’An Yong-bok comportent de nombreux éléments qui ne correspondent pas à la réalité, ce qui fait douter de leur crédibilité (cf. supplément 2).
◎Supplément 1 : An Yong-bok ne représentait pas les autorités coréennes
A la lumière des points suivants, il apparait qu’An Yong-bok n’agissait pas au nom de la Corée.
Le Sukjong Sillok relate le séjour au Japon d’An Yong-bok comme suit :
« Yi Sejae, le représentant du Dongnae-bu (NdT.Administration régionale qui joua un rôle important dans la gestion des relations entre le Japon et le Royaume de Corée) rapporta au roi que l’émissaire de Tsushima* lui avait demandé : un de vos sujets a tenté l’automne dernier de déposer une plainte contre nous. Agissait-il sur ordre des autorités coréennes ? (去秋貴国人有呈単事出於朝令耶). En réponse à cette question, Yi déclara : si nous devons fournir une quelconque justification, nous dépècherons un interprète officiel à Edo. Que pourrions-nous craindre qui justifierait l’envoi d’un pêcheur ignorant. (若有可弁送一訳於江戸 顧何所憚而乃送狂蠢浦民耶). […] Le représentant du Bihenshi (NdT. Bureau des Affaires militaires) déclara pour sa part : la Cour ne se préoccupe pas des actes d’ignorants qui sont ballotés par les vents. (…至於漂風愚民 設有所作為 亦非朝家所知). La réponse à fournir à l’émissaire de Tsushima fut soumise au conseil royal et approuvait par Sa Majesté. (請以此言及館倭允之) ». (Mois de février de la 23e année du règne du roi Sukjon)
La réponse suivante fut transmise au Japon dans une lettre adressée au seigneur de Tsushima par Yi Seon-bak, vice-ministre adjoint au protocole :
« En ce qui concerne le naufragé qui s’est échoué l’an dernier sur vos côtes, les gens qui habitent sur nos rivages vivent de la navigation, et lorsqu’ils sont pris dans une tempête, les vagues les entraînent en peu de temps jusque sur vos terres. (昨年漂氓事濱海之人率以舟楫為業颿風焱忽易及飄盪以至冒越重溟轉入貴国). [..] S’il y avait une plainte de sa part, cela relèverait de la falsification. (…若其呈書誠有妄作之罪). C’est pourquoi nous l’avons condamné à l’exil, conformément à nos lois. (故已施 幽殛之典以為懲戢之地). »
* A l’époque d’Edo, le fief de Tsushima constituait la seule voie officielle pour les échanges diplomatiques et commerciaux entre le Japon et la Corée.
Le bateau d’An Yong-bok arborait un pavillon sur lequel était inscrit « Inspection générale des impôts des îles d’Ulleungdo du Royaume de Joseon. Inspecteur des impôts An à bord », et An se présentait sous le faux titre d’ « inspecteur général des impôts pour les deux îles d’Utsuryo et d’Usan ». An Yong-bok a lui-même admit son usurpation d’identité.
Il semblerait que le titre d’« inspecteur des impôts » ou d’« inspecteur général des impôts » que se donnait An Yong-bok faisait référence au fonctionnaire chargé de percevoir l’impôt sur les îles d’Utsuryo et d’Usan. Il était apparemment persuadé que l’île d’Usan était une île habitée de grande taille.
◎Supplément 2 : La crédibilité des déclarations d’An Yong-bok
Les déclarations d’An Yong-Bok comportent de nombreuses contradictions qui nuisent à leur crédibilité.
An Yong-bok s’est rendu au Japon à deux reprises. Une première fois en 1693, alors qu’il fut emmené au Japon pour témoigner que l’île d’Utsuryo (dont le nom japonais à l’époque était Takeshima) ne se prêtait pas à la pêche, puis une deuxième en 1696, lorsqu’il entra au Japon illégalement pour porter plainte contre le fief de Tottori, qui l’expulsa. Les déclarations d’An Yong-bok contenues dans le Sukjong Sillok constitue un résumé de la déposition prise lorsqu’il fut interrogé par le Bihenshi (Bureau des Affaires militaires) à son retour en Corée. Selon ces dernières, lorsqu’An Yong-bok se rendit pour la première fois au Japon, le shogunat d’Edo lui aurait remis un document reconnaissant l’appartenance des île d’Utsuryo et d’Usan au territoire coréen. qui lui aurait été par la suite confisqué par le fief de Tsushima. Cependant, étant donné que les négociations entre le Japon et la Corée portant sur les activités de pêche autour de l’île d’Utsuryo débutèrent avec le rapatriement d’An Yong-bok en Corée via le fief de Tsushima par les autorités japonaises, il est impossible que le shogunat lui ait remis un quelconque document officiel reconnaissant la souveraineté coréenne sur les îles d’Utsuryo et d’Usan au moment de sa venue en 1693, avant même le démarrage de telles négociations.
En outre, An Yong-bok déclara que lorsqu’il revint au Japon en mai 1696, de nombreux Japonais résidaient sur l’île d’Utsuryo. Pourtant, en janvier de la même année, le shogunat avait déjà décidé d’interdire l’accès à cette île. Il avait d’ailleurs informé le fief de Tottori de sa décision et retiré leurs « droits de navigation » aux familles Ôya et Murakawa. Sur la base de ses déclarations, certains en Corée du Sud avancent que le shogunat aurait décidé d’interdire aux Japonais de naviguer jusqu’à l’île d’Utsuryo suite à la venue au Japon d’An Yong-bok en 1996. Mais ce dernier arriva au Japon quatre mois après la mise en place de cette interdiction.
Dans la déposition qu’An Yong-bok fit à son retour en Corée, il déclare qu’il a apostrophé des Japonais en ces termes : « Matsushima, c’est Jasan (= Usan), et ce territoire appartient également à mon pays. Comment se fait-il que vous viviez ici ? (松島即子山島、此亦我国地、汝敢住此耶) ». Cette histoire est également fausse car aucun Japonais ne s’est rendu sur l’île d’Utsuryo cette année là. Il semblerait qu’An Yong-bok ait été persuadé que l’île d’Usan soit habitable. Quand il se rendit sur l’île d’Utsuryo pour y pêcher en 1693, ses compagnons lui indiquèrent que l’île située au nord-est de l’île d’Utsuryo était l’île d’Usan (Takeshima Kiji). Lorsqu’il fut emmené au Japon, il dit qu’il avait aperçu une « grande île, bien plus grande que l’île d’Utsuryo » (Byeonrye Jibyo). Le fait qu’An Yong-bok ait dit « Matsushima est l’île de Jasan » laisse à penser qu’il avait fait correspondre l’appellation de « Matsushima » (ancien nom de Takeshima), nom dont il avait appris l’existence durant son séjour au Japon en 1693, avec celle d’ « île d’Usan » qui était traditionnellement usitée en Corée. Toutefois, cette affirmation que « Matsushima est l’île de Jasan » n’est qu’une simple question d’appellation et ne signifie nullement qu’elle désignait précisément l’actuelle Takeshima.
Q4Existe-t-il des preuves prouvant une souveraineté coréenne sur Takeshima avant son rattachement par le gouvernement japonais en 1905?
Non, la Corée du Sud n’a apporté aucune preuve concrète de sa souveraineté sur Takeshima.
La République de Corée soutient ainsi que l’île d’Usan figurant dans des documents coréens anciens comme le Sejong Sillok Jiriji (Appendice géographique à la Chronique du roi Sejong, 1454) et le Sinjeung dongguk yeoji seungnam (Édition révisée de la nomenclature augmentée de la géographie de la Corée, 1531) est Takeshima, et que ce groupe d’îles a toujours fait partie intégrante de son territoire national.
Toutefois, le terme « Usan (île d’) » utilisé sur les cartes anciennes et dans les documents anciens coréens est soit un autre dénomination de l’île d’Utsuryo, soit un îlot (Jukdo) située au large de l’île d’Utsuryo, à l’instar de l’Usan représentée sur les cartes éditées à partir du XVIIIe siècle. Mais en aucun cas il ne peut s’agir de Takeshima.
Par ailleurs, la Corée du Sud affirme que « l’ordonnance impériale coréenne no 41 » (1900)* instaura la création d’un « canton d’Utsu » sur l’île d’Utsuryo, sous l’administration duquel elle plaça « l’ensemble des îles d’Utsuryo (Ulleungdo), de Takeshima (Jukdo) et d’Ishijima (Sokdo) ». Elle soutient aussi que cette dernière île n’est autre que l’île de Dokdo (le nom coréen pour Takeshima).
Toutefois, la Corée du Sud doit encore présenter des preuves indiscutables qu’« Ishijima » (Sokdo) et Takeshima sont bien une seule et même île. En outre, même en admettant que le « Sokdo » de l’ordonnance impériale no 41 désigne bien Takeshima, il n’existe toujours aucune preuve d’un contrôle effectif de l’Empire coréen sur ce territoire avant cette date. On considère par conséquent que la Corée n’a jamais établi sa souveraineté sur Takeshima.
* En 1882, le royaume de Corée décida de mettre fin à sa politique pluricentenaire (470 ans) de laisser l’île d’Utsuryo inoccupée pour pouvoir l’exploiter. Plus tard, en juin 1900, considérant le nombre important de Japonais résidant sur cette île, les autorités coréennes décidèrent de mener une enquête conjointe avec les autorités japonaises.
Sur la base du rapport publié suite à cette enquête (le Uldo-gi d’U Yong-jeong), l’Empire coréen (en octobre 1897, l’Empire coréen - ou Empire de Taehan - fut proclamé en remplacement de l’ancien royaume de Joseon) promulgua en octobre 1900 l’ordonnance impériale no 41 portant sur le « changement du nom de l’île d’Utsuryo en île d’Utsu, ainsi que du changement du titre de gouverneur d’île en chef de canton » , compte tenu des nécessités découlant «des échanges diplomatiques et commerciaux avec les étrangers ». L’Article 2 de cette même ordonnance stipule également que « l’ensemble des îles d’Utsuryo (Ulleungdo), de Takeshima Jukdo) et d’Ishijima (Sokdo) » sont plaçées sous l’autorité administrative du nouveau « canton d’Utsu ». Cependant, il n’est fait aucune mention de l’emplacement précis de cette localité d’Ishijima, citée sans aucun préambule.
D’autre part, le rapport de l’enquête conjointe qui avait préfiguré l’ordonnance impériale citée plus haut, indique que l’île d’Utsuryo faisait 70 li de long (*environ 28 km), 40 li de large (*environ 16 km), et 145 li de diamètre (…全島長可為七十里 廣可為四十里 周廻亦可為一百四十五里). Un autre document officiel, « la Requête auprès du Conseil d’État de Joseon (Uijeongbu) relative au changement de l’île d’Utsuryo en île d’Utsu, ainsi que du changement du titre de gouverneur d’île en chef de canton » (1900) du ministre de l’Intérieur Yi Gwang-ha (李乾夏) précise quant à lui que « la zone relevant de l’île concernée fait 80 li de long (*environ 32 km sur 50 li de large (*environ 20 km) » À partir de ces informations, il est clair que Takeshima, qui se trouve à environ 90 km de l’île d’Utsuryo, est située en dehors de ce périmètre et, donc, que l’île d’Ishijima (Sokdo) ne désigne pas Takeshima. Toutefois, la présence d’îles proportionnellement plus grandes, notamment Chikusho (Jukdo) et Gwannumdo, aux environs de l’île d’Utsuryo pourrait laisser penser qu’Ishijima fasse plutôt référence à l’une de ces îles.
1 li japonais = environ 10 li coréens = environ 4 km
Q5Takeshima est-elle comprise dans les « territoires [que le Japon] a acquis par violence et cupidité » de la Déclaration du Caire ?
Non, absolument pas.
La Corée du Sud affirme que Takeshima est inclue dans les territoires « acquis par violence et cupidité » de la Déclaration du Caire (1943) signée par les chefs d’États américain, britannique et chinois durant la Seconde Guerre mondiale. Cependant, alors que Takeshima n’a jamais fait partie du territoire coréen, le Japon a établi sa souveraineté sur ce groupe d’îles au plus tard vers le milieu du XVIIe siècle, l’a réaffirmée en 1905 avec son rattachement au département de Shimane par décision du Conseil des ministres, date depuis laquelle il n’a cessé d’exercer une souveraineté sereine sur cette zone. Ce fait montre bien que Takeshima n’est pas un territoire que le Japon a pris à la Corée.
La question du réglement de la question des territoires après un conflit dépend en dernier ressort des accords internationaux, à commencer par les traités de paix. Dans le cas de la Seconde Guerre mondiale, le statut juridique des territoires japonais après-guerre a été défini par le Traité de paix de San Francisco et la Déclaration du Caire n’a aucune valeur juridique suprême quant au règlement de cette question. Le Traité de paix de San Francisco a confirmé la souveraineté du Japon sur Takeshima.
Q6Les îles Takeshima ont-elles été exclues du territoire japonais par le Commandement suprême des forces alliées dans le Pacifique (SCAP) après la Seconde Guerre mondiale ?
Non, absolument pas. Le SCAP n’avait aucune autorité pour prendre des décisions relatives à la question des territoires nationaux. La Corée du Sud prétend que les SCAPIN (Notes d’instruction générale du Commandement suprême des forces alliées dans le Pacifique) 677 (cf. supplément 1) et 1033 (cf. supplément 2) excluaient Takeshima du territoire japonais. Cependant, ces deux documents sur lesquelles s’appuie la Corée du Sud indiquent clairement qu’« aucune disposition de ces directives ne signifie une décision définitive des Alliés sur la question de l’appartenance des territoires », éléments qui n’est jamais mentionné dans les arguments de la Corée du Sud. Par conséquent, les affirmations coréennes sont totalement infondées.
Après guerre, le statut juridique des territoires japonais a été fixé par le Traité de paix de San Francisco (entré en vigueur en 1952). Par conséquent, il est clair que la manière dont le SCAP a traité la question de Takeshima avant l’entrée en vigueur du Traité de paix de San Francisco n’influence en aucune manière l’appartenance nationale de ce territoire, tant du point de vue historique que du droit international.
◎Supplément 1 : SCAPIN-677
En janvier 1946, lorsque le Commandement suprême des forces alliées dans le Pacifique (SCAP) ordonna par la directive SCAPIN-677 au gouvernement japonais de cesser provisoirement d’exercer ou de tenter d’exercer un pouvoir politique ou administratif sur certains de ces territoires, il fut précisé dans l’article 3 dudit document que « dans le but de cette directive, le Japon se définit comme comprenant les quatre îles principales du Japon (Hokkaido, Honshu, Kyushu et Shikoku) et approximativement 1000 îles plus petites avoisinantes, y compris l’île de Tsushima et les îles Ryukyu (Nansei) au nord du 30e parallèle (sauf l’île Kuchinoshima) ; et à l’exclusion de [...] ». La directive énumérait ensuite une liste où figuraient, entre autres, Takeshima, l’île d’Utsuryo (« les îles Ullung-do »), l’île de Cheju, les îles Izu et Ogasawara.
Cependant, l’article 6 de ce même document indique clairement qu’ « aucune disposition de cette directive ne signifie une décision définitive des Alliés sur les petites îles indiquées à l’article 8 de la déclaration de Potsdam » (Déclaration de Potsdam, article 8 : « […] la souveraineté japonaise sera limitée aux îles de Honshu, Hokkaido, Kyushu, Shikoku et autres îles mineures à déterminer ») La Corée du Sud ne présente jamais ces éléments dans son argumentation.
◎Supplément 2 : SCAPIN-1033
En juin 1946, lorsque le SCAP délivra la directive SCAPIN-1033 par laquelle il élargissait la zone où le Japon était autorisé à mener des activités de pêche et baleinières (dite ligne MacArthur), l’article 3 dudit document spécifiait que « les navires et équipages japonais ne doivent pas s’approcher à plus de douze (12) miles marins de Takeshima (37°15' de latitude Nord, 131°53' de longitude Est), et n’avoir aucun contact avec ladite île (Japanese vessels or personnel thereof will not approach closer than twelve (12) miles to Takeshima [37°15' North Latitude, 131°53' East Longitude] nor have any contact with said island)».
Toutefois, l’article 5 de la directive indique clairement que « la présente autorisation ne reflète nullement la politique des Alliés relative à une décision définitive sur la juridiction nationale, les frontières internationales ou les droits de pêche dans la zone concernée ou toute autre zone (The present authorization is not an expression of allied policy relative to ultimate determination of national jurisdiction, international boundaries or fishing rights in the area concerned or in any other area)». Ces faits ne sont jamais cités dans les éléments fournis par la Corée du Sud.
La ligne MacArthur fut supprimée le 25 avril 1952 et, avec l’entrée en vigueur du Traité de paix de San Francisco trois jours plus tard (28 avril 1952), les directives relatives à la suspension de l’autorité administrative du Japon sont devenues tout naturellement caduques.