Conférence de presse du ministre des Affaires étrangères MOTEGI Toshimitsu

2021/2/5

Négociations sur les Territoires du Nord

 
NHK : Dans deux jours, le 7 février, c’est le « jour des Territoires du Nord ». J'aimerais poser des questions de fond sur les négociations du traité de paix ainsi que sur les projets de coopération économique entre le Japon et la Russie. Au cours de cette année, du fait du nouveau coronavirus, il a été difficile de mener des négociations ou des consultations face à face, y compris sur le plan opérationnel. Où en sont actuellement les négociations ? Quelles sont les perspectives futures en termes de progression des négociations et de la coopération économique ?
 
M. MOTEGI Toshimitsu : On ne peut pas nier que, au cours de l'année passée, des rencontres ont eu lieu de manière répétée, à l’image des négociations que j’ai mené pendant plus de huit heures à Moscou à la fin 2019 avec le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, en charge des négociations pour la Fédération de Russie. Même s’il est regrettable que des consultations « physiques » n'ont pu être organisées  en raison du développement de la pandémie de la COVID-19 en 2020, alors même que des perspectives de développement se faisaient jour, nous sommes convenus de poursuivre nos consultations, comme celles relatives au traité de paix lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères d’octobre 2020. J'ai également cru comprendre que le Premier ministre SUGA et le Président POUTINE ont accepté de maintenir le dialogue entre le Japon et la Russie, y compris concernant les négociations du traité de paix.
 
Pour être franc, je pense qu'il n'est pas aisé de résoudre une question qui est restée en suspens pendant plus de 70 ans depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Je suis cependant certain que les négociations que nous avons menées jusqu'à maintenant nous ont permis de distinguer clairement les domaines sur lesquels nos deux pays peuvent s'entendre de ceux sur lesquels nos positions divergent. En ma qualité de négociateur officiel, je continuerai à faire tout mon possible pour parvenir à une résolution de la question de l’attribution [des Territoires du Nord] et à la conclusion d’un traité de paix.
 
En outre, en ce qui concerne les projets [de coopération] et les actions humanitaires dans les quatre îles du Nord, bien que la plupart n'aient pas pu être mis en œuvre durant l’année dernière du fait de la pandémie, nous sommes convenus de les relancer une fois la situation pandémique améliorée. En tout état de cause, les responsables au sein des administrations japonaises et russes continueront de se consulter en vue de leur préparation.

 

Situation au Myanmar (possibilité de sanctions)

 
Yomiuri Shimbun : Je voudrais aborder la situation au Myanmar. Suite à l’arrestation de la conseillère spéciale de l'État Daw Aung San Suu Kyi, le gouvernement des États-Unis a suggéré un rétablissement des sanctions. Pouvez-vous nous dire si le gouvernement japonais envisageait  également de prendre des sanctions si la détention de la conseillère spéciale de l'État Daw Aung San Suu Kyi devait se prolonger ?
 
M. MOTEGI Toshimitsu : Tout d'abord, le Japon est très préoccupé par la situation au Myanmar, où l'état d'urgence a été décrété et où le processus de démocratisation est remis en question. Une déclaration officielle du Ministère des Affaires étrangères a déjà été publiée le jour même de la déclaration de l'état d'urgence.
 
Le gouvernement du Japon a fermement soutenu le processus de démocratisation au Myanmar. Il est donc pour nous extrêmement regrettable que des actions soient prises qui vont à l'encontre de ce processus.
 
Au sein de la communauté internationale, le Japon maintient le contact avec les autorités et l’armée birmanes via divers réseaux. Lors de la Rencontre des ministres des Affaires étrangères et de la Défense du Japon et du Royaume-Uni (Réunion « 2+2 ») du 3 février dernier, nos interlocuteurs nous ont posé un nombre important de questions pour connaître, par exemple, notre point de vue sur la situation. Je pense donc qu'il y a une vraie conscience de la communauté internationale des différents réseaux diplomatiques que le Japon entretient.
 
Hier midi, j'ai appelé l'ambassadeur du Japon au Myanmar, Ichiro MARUYAMA, pour parler de la sécurité des ressortissants japonais au Myanmar. Je lui ai aussi donné des instructions notamment sur la manière de procéder pour faire avancer la situation. Notre ligne politique est d'exhorter à nouveau l'armée birmane à rétablir rapidement le système politique démocratique au Myanmar.
 
C’est le message que nous tenons en priorité, mais il nécessite également que nous fassions le point sur différents éléments afférents, notamment sur les développements accomplis au Myanmar. Les ministres des Affaires étrangères du G7 ont publié une déclaration conjointe et nous allons étudier plus avant notre réponse en surveillant de près l'évolution de la situation en coopération avec les pays concernés.

 

Une version japonaise de la « loi Magnitsky »

 
Yomiuri Shimbun : Sur ce point, certains membres de la majorité et de l’opposition demandent l’adoption d'une version japonaise de la « loi Magnitsky ». Quelle est votre position ?
 
M. MOTEGI Toshimitsu : Tout d'abord, le Japon respecte le principe universel des droits de l'Homme et estime que tous les pays ont pour responsabilité première de les protéger. Dans cette optique, le Japon s’exprime fermement contre toutes violations graves des droits de l'Homme dans cette optique et, dans le même temps, nous exhortons les pays à prendre des initiatives personnelles en dialoguant et en collaborant avec les pays qui œuvrent en faveur de leur démocratisation et de la  protection des droits de l'Homme.
 
Dans ce contexte, sur la question de savoir si le Japon devrait se doter de son propre instrument pour identifier et sanctionner les violations des droits de l'Homme que vous venez d’évoquer, je pense qu'une analyse et un suivi constants doivent être menés sous différents angles, comme par exemple la diplomatie humanitaire que le Japon a développé jusqu’à aujourd’hui et que je viens d’évoquer, ou encore les tendances générales au sein de la communauté internationale.

 

Mesures anti-terroristes du Japon en Afrique du Nord

 
PanOrient News : Je voudrais vous poser une question sur le terrorisme en Afrique du Nord-Ouest. Il semblerait que l'attaque d’hier en Tunisie, qui a coûté la vie à 4 militaires tunisiens, marque un retour du terrorisme dans la région. Le Japon a subi des pertes dans cette région, dont une fois en Algérie il y a 8 ans. Je crois que vous étiez ministre de l’Économie à l'époque. Dix Japonais furent tués dans un attentat terroriste. Quelles sont les mesures prises par le Japon pour éviter de telles attaques terroristes dans cette région et pour y protéger ses intérêts ?
 
M. MOTEGI Toshimitsu  : Un acte terroriste a eu lieu en Tunisie. Le Japon condamne fermement le terrorisme sous toutes ses formes, qui est injustifiable.
 
À ce jour, le Japon a mené diverses initiatives pour lutter contre le terrorisme en Afrique du Nord. En Tunisie, que vous avez mentionnée, le Japon a fourni un soutien au renforcement des capacités de contrôle des frontières, initié le dialogue nippo-tunisien sur la sécurité et la lutte contre le terrorisme et organisé des échanges de points de vue avec les forces de sécurité et les autorités tunisiennes.
 
Je me suis rendu en Tunisie en décembre 2020. Je me suis entretenu avec le Président Kaïs SAÏED et M. Hichem MECHICHI, chef du gouvernement tunisien. J'ai confirmé que le Japon et la Tunisie continueraient de coopérer étroitement, y compris dans le domaine de la sécurité. Nous continuerons d’œuvrer en faveur de la paix et de la stabilité dans la région, tout en coopérant avec les pays concernés.
 

Situation au Myanmar (Communication avec l'armée du Myanmar)

 
Sankei Shimbun : Ma question concerne la situation au Myanmar. Vous avez mentionné plus tôt que, au sein de la communauté internationale, le Japon disposé de multiples réseaux pour discuter avec l’armée et les autorités birmanes. Peut-on en conclure que le gouvernement japonais est déjà en contact avec l'armée birmane et lui fait part de ses positions ?
 
M. MOTEGI Toshimitsu : C'est un sujet extrêmement sensible pour le moment. Je m'abstiendrais donc aujourd’hui de tout commentaire sur nos différents réseaux.
 

Discours de politique étrangère du Président américain Biden

 
Sankei Shimbun : Aujourd'hui, le Président BIDEN a prononcé son discours de politique étrangère. Même s’il présente une attitude ferme face à la Chine et à la Russie, il met l'accent sur la coopération avec les alliés des États-Unis, comme le Japon, et les partenaires qui partagent les mêmes positions. Qu’en pensez-vous ?
 
M. MOTEGI Toshimitsu : Le discours de politique étrangère du Président BIDEN montre la volonté des États-Unis de tenir une place de premier plan sur un certain nombre de dossier internationaux en utilisant la phrase clé « L'Amérique est de retour ».
 
Le Président BIDEN a également déclaré qu'il était important de coopérer avec ses alliés dans l'élaboration d’une politique étrangère et qu'il s’était entretenu par téléphone avec les dirigeants des principaux pays alliés des États-Unis, dont le Japon. Le Japon salue la position adoptée par le Président BIDEN et son administration.
 
Lors de mon récent entretien téléphonique avec le Secrétaire d'État BLINKEN, nous avons échangé sur la situation régionale et l'importance d’un « Indopacifique libre et ouvert ». Nous sommes convenus de coopérer étroitement sur divers dossiers qui concernent l’ensemble de la communauté internationale, notamment la lutte contre la COVID-19 et le changement climatique.
 
Nous sommes également d’accord pour relancer le G7 et en faire un relais entre les pays démocratiques. Tout en renforçant l'Alliance nippo-américaine par le biais d’une coopération multisectorielle entre nos deux pays, y compris entre le Premier ministre SUGA et le Président BISEN ainsi qu’entre le Secrétaire d'État BLINKEN et moi-même, nous développerons différents types de coopération, notamment sur l’« Indopacifique libre et ouvert », centrés sur le Japon et les États-Unis et impliquant les autres pays concernés.
 

Sélection du prochain Directeur général de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)

 
NHK : En ce qui concerne la sélection du prochain Directeur général de l'OMC, on a appris que la ministre du Commerce de la République de Corée (ROK), Mme Yoo Myung-hee, avait retiré sa candidature. Ne reste donc plus que la seule candidate nigériane. Avez-vous un commentaire à faire ?
 
M. MOTEGI Toshimitsu : Je sais que le gouvernement de la République de Corée a annoncé aujourd'hui son retrait du processus de sélection du prochain Directeur général de l'OMC. Dans la perspective d’une reprise post-COVID de l'économie mondiale et pour promouvoir une réforme de l'OMC, le Japon a lancé un appel à plusieurs pour le successeur au poste de Directeur général de l'OMC, resté vacant depuis la démission de M. Roberto AZEVÊDO en septembre 2020, soit désigné le plus rapidement possible.
 
Nous avons eu la confirmation que la candidate nigériane, Mme Ngozi OKONJO-IWEALA, avait obtenu un large soutien de nombreux pays membres de l'OMC lors du processus de sélection mené en 2020 et que le gouvernement de la République de Corée avait retiré sa candidate. À l'avenir, le Japon espère que, conformément au processus impliquant les États-Unis et tous les autres pays membres, la candidate OKONJO-IWEALA sera promptement choisie à l'unanimité pour que nous puissions travailler sur les dossiers laissés en suspens.


Traduction provisoire et purement informative
Article original (en anglais)